Bagdad Café : un journaliste irakien passe au Club pour causer "métier"

Lyon, le 16 novembre 2022. Le doyen de la faculté des médias de l’Université de Bagdad, le professeur Pr Ammar Taher MOHAMMED est passé aujourd'hui rencontrer quelques journalistes lyonnais au Club. L'occasion d'échanges riches sur le métier, ses évolutions et les nécessaires adaptations des cursus de formation...

"Mon objectif en venant en France est d’explorer des pistes de collaboration entre la faculté des médias de l’Université de Bagdad et divers établissements français. Je suis ainsi passé à l’ESJ-Lille, à l'EJCAM d’Aix-Marseille avant d'arriver ici à Lyon, où j'ai été accueilli à l'ICOM* (université Lumière Lyon 2), par Simon Gadras et son équipe", explique Ammar Taher MOHAMMED, qui est à fois le doyen de la faculté des médias de l’Université de Bagdad, mais aussi le doyen coordinateur des autres établissements universitaires égyptiens d'enseignement du journalisme.

Photo ci-dessus : lors des échanges de ce matin, en présence de six journalistes lyonnais. Crédit photo : Boris Heim, Club de la presse de Lyon, 2022

Le doyen est également depuis 2004 le rédacteur en chef du quotidien international "Al-Zaman" édité depuis Badgad et Londres. Le visiteur et sa délégation étaient également très intéressés de rencontrer des professionnels des médias français afin de mieux connaître le secteur, ses pratiques et l’adéquation entre formation et monde professionnel. L'objectif final étant, pour cette équipe, de faire évoluer les curricula de leur faculté.

Représenté par son président (Jean-Pierre Vacher), son vice-président (Raphaël Ruffier-Fossoul) et son délégué général (Boris Heim), le Club était honoré de cette visite, qui lui a ouvert une intéressante fenêtre sur le journalisme dans le monde arabe.

Photo : Boris Heim, Club de la presse de Lyon

Echange de points de vues

Pendant 90 minutes avec cette délégation venue d'Irak, il a notamment été question de liberté de la presse, des défis financiers posés à la presse indépendante et d'investigation, du respect du secret des sources, des procès en diffamation et des procédures-baillon, de déontologie journalistique, du CDJM, du "Haut conseil de l'information" irakien, des normes professionnelles et "règles de comportement" en vigueur en Irak, de la loi irakienne de 2011  sur la "protection des journalistes"...

(Très) Mauvais classement au baromètre RSF

Il a évidemment aussi été question du (très) mauvais classement international 2022 (172e/180 soit une chute de 9 points par rapport à l'an dernier) de l'Irak par RSF dans son classement de la liberté de la presse... (à retrouver ici). "Entre terrorisme, instabilité politique et manifestations, les journalistes d'Irak font face à des menaces de tous bords et se heurtent à la faiblesse de l'État, qui faillit à son rôle de les protéger", explique RSF.

Photo ci-dessus : le doyen Ammar Taher MOHAMMED. Crédit : Boris Heim, Club de la presse de Lyon

Vue d'Irak

"Les médias occidentaux sont libres et très professionnels, mais je trouve qu'ils ont une vision sélective de l'Irak", explique le doyen Ammar Taher MOHAMMED. "Sélective en ce sens qu'ils privilégient certains sujets, et qu'ils se basent sur des stéréotypes qui existent en Occident sur le monde arabophone." Le doyen assure que si les défis restent nombreux dans son pays ("beaucoup de journalistes ont été tués, enlevés, torturés, mis sous pression, insultés"), "les journalistes irakiens jouissent aujourd'hui de beaucoup de liberté", "un syndicat national les protège", "les juges des chambres spéciales sur le droit de la presse écoutent les avis des experts du monde des médias quand il s'agit de juger des confrères", "que la protection des sources est respectée en Irak", etc.

"Nos étudiants en journalisme ont récemment produit de belles enquêtes sur la pollution de l'eau potable, le problème de la drogue, la maltraitance des orphelins ou encore le trafic d'organes humains et il sont bien classés dans les concours internationaux, mais leurs travaux ne sont pas publiés en Irak"...

Le Club compte quelques journalistes arabophones, qui ont été conviés à la rencontre. Comme par exemple Mohamed Abdel Aziz, le journaliste-écrivain égyptien qui avait lancé le service en langue arabe d'Euronews en 2008 et qui vient de publier un docu-fiction sur le journaliste égyptien qui a provoqué l'étincelle de la place Tahrir (Mohamed est à retrouver dès lundi 21 novembre 2022 dans notre rubrique "Talents d'adhérents").

Photo ci-dessus : La délégation irakienne était composée du professeur Ammar Taher MOHAMMED, (au centre, en costume beige) doyen de la Faculté des Médias de l’Université de Bagdad (il est aussi président du groupe des doyens des facultés des médias d’Irak), du professeur Mohammed Abed HASAN (à d.),  directeur du département des relations publiques, du professeur Talib Abdulmaged DHEYAB, (à d., cravate noire) assistant du doyen chargé des affaires administratives et directeur de "Avenir", une grande radio irakienne ; et du professeur Ali Jabbar Mohammed AL-ZAKI, adjoint au doyen chargé des affaires scientifiques (à g.). A l'arrière-plan (de g. à d.) : Simon Gadras (ICOM) et Jean-Pierre Vacher (président du Club de la presse). Crédit photo : Boris Heim, Club de la presse de Lyon, 2022

Un (excellent) interprète français-arabe était fourni par Campus France. Nous le remercions d'avoir pris la grande photo de groupe ci dessous.

Photo ci-dessus : l'ensemble des participants à cette rencontre (manque Alexandre Buisine, syndicaliste SNJ). Crédit : DR, Club de la presse de Lyon

NB : Le Club (dont l'une des missions historique est d'accueillir les journalistes étrangers à Lyon) a récemment contacté des journalistes iraniens pour leur proposer une tribune.

(*) L'ICOM est l'un des huit pôles de formation partenaires du Club, avec qui nous avons notamment co-construit le Festival auralpin des étudiants en journalisme. L'ICOM soutient également activement le Groupe de travail créé par le Club pour préserver et exploiter la mémoire des radios libres lyonnaises et du Rhône, à l'oeuvre depuis 2021 et jusqu'en 2026.